Dans ce 5ᵉ épisode de Zone, l’équipe reçoit Mathias, cofondateur de The Product Crew (TPC), pour décortiquer les premiers enseignements de leur grande enquête annuelle. Une étude qui dresse un portrait sans filtre du marché de la tech en France, des tensions sur le recrutement aux mutations des métiers du produit. Plongée dans un secteur en pleine transition.
Un marché post-crise, mais en redémarrage
Après l’explosion post-COVID, 2023 a marqué l’éclatement de la bulle. Les scale-ups, surdimensionnées par des levées massives, ont été les premières victimes. Résultat : licenciements, gel des recrutements et effet domino sur toute la filière.
Mais en 2024, les lignes bougent. 49 % des entreprises interrogées envisagent de recruter, contre seulement 4 % qui prévoient des licenciements. On parle donc bien d’une sortie de crise lente mais réelle. Le dynamisme reste marqué du côté des jeunes pousses et des PME plus discrètes médiatiquement, mais encore agiles.
Recruter des devs reste un casse-tête
Malgré la tempête, la pénurie de développeurs demeure. 51 % des répondants déclarent rencontrer des difficultés à recruter des profils tech. En cause ? Un marché tendu, des exigences croissantes en matière de télétravail, et une préférence marquée pour le freelancing et le full remote.
Un développeur sur quatre est désormais en 100 % télétravail, contre seulement 10 % côté product. Et pour séduire ces profils, proposer du full remote devient un véritable levier d’attractivité, bien plus efficace qu’un énième babyfoot.
Salaires : vers une normalisation
Les salaires dans la tech ne s'effondrent pas, mais la croissance folle est bel et bien derrière nous. En 2024, les revalorisations sont plus rares et plus modestes :
- +0,7 % d’augmentation moyenne pour les développeurs,
- un peu plus d’1 % côté Product,
- seule la data tire son épingle du jeu (+4 %).
Pourquoi la data ? Parce que les entreprises cherchent désormais à concilier décisions business et précision analytique, au-delà du simple hype autour de l’IA.
Pourquoi on reste (ou on part)
Une donnée clé ressort : 1 salarié sur 2 prévoit de changer de job dans l’année. Ceux qui partent le font d’abord pour la rémunération. Ceux qui restent évoquent le challenge et les perspectives d’apprentissage comme principaux moteurs.
Le mythe du “télétravail à tout prix” est aussi nuancé : si les devs le plébiscitent, les fonctions Product et Design tendent à revenir partiellement au bureau pour cultiver l’intelligence collective.
Le métier de Product : rôle central, reconnaissance fragile
Une grande partie du podcast est consacrée à la redéfinition du métier de Product Manager. Tous s’accordent : ce rôle est un trait d’union entre la tech, le design et le business. Il doit aligner des intérêts parfois opposés, tout en influençant sans autorité directe. Un rôle éminemment humain, stratégique… mais encore trop souvent incompris.
Le syndrome de l’imposteur est très présent dans la communauté. La “martygaganite” – cette obsession pour un Product Management idéalisé à l’américaine – génère frustration et déconnexion avec la réalité opérationnelle.
Pire encore : près d’un PM sur deux estime que la culture produit dans sa boîte est “insuffisante ou mauvaise”.
Soft skills, culture produit et leadership : les nouveaux enjeux
Plus qu’une méthode, le Product devient une culture transversale. Les équipes tech doivent apprendre à penser “impact” et “business”. Les Product doivent développer leur capacité à influencer. Mais tout cela reste vain sans un leadership fort, visionnaire et inspirant.
Car au fond, tout part du management : vision, alignement, priorisation. C’est ce qui fait la différence entre une boîte où le produit avance… et une boîte où l’on exécute des tickets sans comprendre pourquoi.
Ce qu’il faut retenir
- Le marché redémarre lentement mais sûrement ;
- Le télétravail est un avantage compétitif à ne pas sous-estimer, notamment côté dev ;
- Les salaires stagnent, sauf pour les profils data ;
- Le Product Manager est un métier-clé, encore trop souvent mal compris ;
- La culture produit est le nerf de la guerre, mais elle fait défaut dans 50 % des cas.
Pour aller plus loin
👉 L’enquête complète TPC sera bientôt disponible en ligne et sur LinkedIn. Elle est un outil précieux pour se positionner, que l’on soit candidat, recruteur ou simple observateur de la tech française.